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La Madeleine Proust s’accroche

THEATRE

La Madeleine Proust s’accroche

Son franc-parler n’appartient qu’à elle. Deux ans après ses adieux à l’Olympia, la Madeleine Proust reprend du service au Rive-Gauche. La grand-mère a gardé l’accent de la Franche-Comté, mais elle s’est mise au slam et au rap.

Caroline Andrieu | 27.08.2008, 07h00

 

ELLE SE CRAMPONNE comme un souvenir, la Madeleine Proust. Il y a deux ans, à l’Olympia, la brave paysanne quittait le corps de Lola Sémonin et n’était pas censée revenir. Vingt-cinq ans que la vieille femme occupait la scène avec son accent franc-comtois et ses formules pleines de bon sens. La comédienne croyait avoir fait le tour du personnage. 

Mais la Madeleine s’incruste, et la voilà de nouveau pour quelques semaines au Théâtre Rive-Gauche. Elle est revenue en douce, comme un souvenir en sommeil remonte à la surface, à cause d’un gamin dans un bistrot. « Un petit rebeu (NDLR : arabe, en verlan) qui jouait au flipper, raconte Lola Sémonin. Il m’a reconnue. Ça m’a étonnée ! Je lui ai dit : Tu t’intéresses à la Madeleine, toi ? Il m’a répondu : Evidemment, la Madeleine, c’est mes racines ! » Le petit rebeu de Morteau (Haut-Doubs, 7 000 habitants et la célèbre saucisse) n’a jamais connu le Maroc mais la Madeleine Proust fait partie de sa famille.

« J’étais instit, tous les gamins étaient fils de paysans. J’ai eu l’idée grâce à eux »

Sous sa perruque blanche et dans sa chasuble, la fermière à la retraite reprend à son compte une phrase entendue dans sa campagne : « Les musulmans, ils prient beaucoup, ils sont très chrétiens. » Quand elle écrit les monologues de sa Madeleine, Lola Sémonin invente beaucoup, mais elle emprunte aussi. « C’est comme ça que le personnage est né, explique l’artiste, belle brune de 57 ans, explosive d’enthousiasme. J’étais instit dans un lieu-dit de Morteau, tous les gamins étaient fils de paysans. J’aimais beaucoup ces gens, j’ai eu l’idée grâce à eux. Mon ami m’a dit : Appelle-la Madeleine Proust pour toutes les réminiscences que ça va générer. Et je me suis lancée pour vingt représentations au théâtre municipal… »

Lola Sémonin a vite laissé tomber l’Education nationale et ses carcans. Elle est partie sur les routes, a croisé celle de Pierre Bonte, défenseur des causes rurales, qui l’a menée à Drucker et sa fameuse émission « Champs-Elysées ». C’était parti pour un triomphe, quatre spectacles différents, un million de spectateurs.

Cette fois, pour la première fois, elle s’adjoint les services d’un metteur en scène, Caroline Loeb. Et là, surprise : Caroline Loeb a commencé par éliminer tout l’univers du personnage, sa cuisine avec batteries de casseroles et calendrier des postes, la cour de sa ferme et ses poules. « De toute façon, c’était trop fort visuellement, on ne pouvait pas faire plus, explique l’ex-chanteuse passée à la mise en scène. Il fallait mettre toute la lumière sur Madeleine. »

Sur la scène du Rive-Gauche, dès ce soir, il y aura donc la paysanne, bien sûr, mais on devinera aussi Jocelyne, et puis Jenifer et tous les autres jeunes du village. Parmi eux Kamel, échappé du béton, apprivoisé par la vieille femme… à moins que ce soit le contraire. Lola Sémonin se met au rap et au slam, troque ses pantoufles pour des baskets, construit « un pont entre deux générations et deux cultures, entre deux langues aussi ». Elle ne jure plus que la Madeleine s’arrêtera là. Une telle boîte à souvenirs, on ne la referme pas comme ça.

Théâtre Rive-Gauche, 6, rue de la Gaîté, Paris XIV e . Du lundi au vendredi à 19 h 30, le samedi à 17 heures et 19 h 30. Places : de 25 à 35 €. Tél. 01.43.35.32.31.


Le Parisien

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